Introduction

 


Roumanie, Espagne, Italie : les populations lupines de ces trois pays sont, dans l'ordre, les plus importantes d'Europe à l'ouest de la Russie. En Roumanie, la chaîne des Carpates abrite les plus importantes populations de grands prédateurs (ours, loup, lynx) : sur environ 1.4 % du territoire européen, les effectifs du loup se situeraient, selon les estimations, entre 2500 et 3400 individus (entre 30 % et 40 % de la population européenne). En Europe de l'ouest, les populations les plus importantes se trouvent en Espagne (2000 loups). en Italie (entre 500 et 1000 loups). Toutes ces populations connaissent une phase d'expansion assez nette depuis le début des années 1970.

Les mouvements de dispersion des loups des Abruzzes vers l'arc alpin par la chaîne des Apennins sont désormais bien connus. En Europe, il existe d'autres tendances et courants de migration :

Espagne => Pyrénées
Pologne => Allemagne (Brandenbourg)
Russie => Finlande
Roumanie => Hongrie
Croatie => Slovénie => Alpes

 


Qu'ont en commun un berger des Carpates, un éleveur de vaches ou de chevaux dans les Asturies, un scientifique du Parc National des Abruzzes, en Italie, on un garde de la Réserve de Chasse de la Sierra de la Culebra, en Espagne ? La présence du loup, qui n'a jamais disparu des péninsules italienne, ibérique et balkanique, et avec lequel il faut bien composer, travailler, vivre ...

Comme on a pu le constater partout où il est en phase de recolonisation, le retour du loup peut changer, voire même bouleverser les systèmes en place. Il constitue notamment une menace bien réelle sur l'outil de travail des professionnels de l'élevage - d'une importance écologique et économique primordiale pour tous les espaces naturels protégés d'Europe. Mais comment peut-on être berger ou éleveur sur un territoire où le loup est présent en densité importante ? Que pense-t-on du loup dans des régions où prédateurs et troupeaux coexistent depuis des millénaires, sans discontinuité, comme en Espagne, en Italie, en Roumanie ? Et comment coexister avec le loup quand on est garde ou gestionnaire d'un espace naturel, chasseur, écologiste, responsable politique ou syndical ?

Quatre stages, organisés entre octobre 1997 et avril 2000 par l'Atelier Technique des Espaces Naturels, ont permis aux agents des espaces naturels français d'aller à la rencontre des acteurs locaux, de "ceux qui vivent avec le loup" : éleveurs et bergers, personnel des parcs et réserves, gardes et administrateurs, scientifiques, représentants politiques et syndicaux. Ces stages ont également permis de mettre en référence les situations dans cinq espaces naturels de trois pays différents:
• En Italie :
Parc Régional du Gigante (à la frontière entre Reggia-Emilia etToscane) ; Parc National des Abruzzes (Abruzzes et Molise)
• En Espagne :
Réserve Régionale de Chasse de la Sierra de la Culebra (Province de Castille-Leon) Parc Naturel de Somiedo (Principauté des Asturies)
• En Roumanie :
Parc Naturel de Piatra Craiului (Département de Brasov, Carpates méridionales).

Le loup est bien présent sur tous les territoires étudiés. Il n'a jamais disparu des Abruzzes, du Leon, des Asturies, des Carpates. Seul le Parc Régional du Gigante a connu une discontinuité de sa présence: le loup a disparu de l'Alto Appennino au début des années 50 - pour revenir dès 1982. On verra, et ce n'est sans doute pas un hasard, que c'est sur ce territoire que les pertes ont été le plus nettement ressenties. Partout ailleurs, d'après les éleveurs, les attaques sur les troupeaux "font partie de la tradition": une réflexion que l'on entendra exprimée à l'identique en roumain, en italien, en espagnol.

 

Roumanie, Espagne, Italie :
les populations lupin es de ces trois pays sont, dans l'ordre, les plus importantes d'Europe à l'ouest de la Russie.