1.3 - Protection des bovins et équins: cas particuliers et stratégies nouvelles









"Avec un prédateur comme le loup, aucune méthode de protection ne sera jamais efficace à 100%"











Plusieurs réflexions reviennent avec régularité à travers les témoignages de "ceux qui vivent avec le loup". D'un bout à l'autre de l'Europe, dans des langues différentes mais en des termes pratiquement identiques, nous avons entendu les mêmes phrases-clés, dont la première est sans doute : "Il faut protéger le troupeau en permanence, ça fait partie du métier". Une réflexion que les éleveurs de la Sierra de la Culebra renforcent par la maxime : "Le loup est le berger du berger"


Protection des bovins dans les Asturies: une stratégie nouvelle et efficace

Dans les Asturies, une nouvelle technique de protection est apparue dans les années 1970, en même temps que se développait l'élevage des bovins. Les chiens sont utilisés sur l'alpage, seuls avec le troupeau. De plus en plus d'éleveurs adoptent cette stratégie, avec succès.

A Somiedo, on utilise avec succès les chiens de protection pour la défense des bovins, qui constituent l'essentiel du cheptel de cette région des Asturies. "Aujourd'hui, de plus en plus de troupeaux de vaches sont gardés sur l'alpage par les mas tins seuls, sans berger, explique Guillermo Feito, représentant des éleveurs de Somiedo. C'est le seul moyen de protection efficace". Cette technique apparaît comme nouvelle dans la région, où traditionnellement, les troupeaux de vaches n'étaient pas gardés par des chiens. "Dans les années 1970, des éleveurs ont commencé à utiliser les mastins. On les achète aux bergers transhumants d'Extremadure. Et c'est vrai que les dommages diminuent de beaucoup quand on a des chiens. Dans mon cas, il ya six ans, j'ai eu trois veaux tués et une vache mordue. Depuis que j'ai des chiens, je n'ai pas eu de dégâts. Il faut compter trois mastins pour une cinquantaine de vaches. Le propriétaire leur amène de la graisse et de la nourriture tous les trois ou quatre jours".Guillermo Feito ajoute que cette technique ne peut être efficace qu'avec les bovins : "Ce serait impossible avec des troupeaux de moutons de 1500 têtes, les mastins n'ont aucun contrôle sur le groupe".

Un cas particulier: la stratégie du remboursement chez les éleveurs de chevaux

Dans les régions de montagne, l'élevage des chevaux est un phénomène relativement nouveau, lié au développement du tourisme équestre. En Europe de l'ouest, notamment dans les Abruzzes et les Asturies, on a pu constater que pour faire face au problème des prédateurs, les éleveurs ont adopté la même stratégie de fuite en avant, uniquement basée sur le remboursement des dégâts.

"Les attaques sur le troupeaux de chevaux concernent essentiellement les poulains, constate Rosario Fico, le vétérinaire des Abruzzes. En effet, les chevaux ne défendent pas les petits face aux prédateurs, contrairement aux bovins, qui ont l'instinct de se regrouper pour protéger les veaux. Leur seule stratégie de défense est la fuite". Pour Rosario Fico, les attaques sur les Equins apparaît comme un problème relativement nouveau: "Il y a une vingtaine d'années, le loup tuait beaucoup plus de moutons que de chevaux. Les attaques sont aujourd'hui bien plus fréquentes sur les équins que sur les ovins et bovins: 40 % des dégâts concernent les chevaux, alors qu'ils ne représentent que 4% des animaux élevés dans la région des Abruzzes".  Pour Rosario Fico, ces chiffres s'expliquent assez facilement : entre les parcs du Gran Sasso, de la Maiella et le Parc National des Abruzzes, la région est devenue un grand centre du tourisme équestre. Or, les chevaux, entravés et laissés en semi-liberté, ne sont jamais gardés, pas même la nuit. "En fait, la stratégie des éleveurs de chevaux est assez simple. 80% d'entre eux ont une autre activité, le plus souvent liée au tourisme. Comme cette activité les occupe surtout en été, ils laissent le poulain sous la mère, sans plus s'en occuper. Le poulain, s'il survit, est récupéré par l'éleveur à la fin de la saison. Sinon, il empoche le dédommagement : le poulain ne lui a rien coûté. C'est une stratégie assez commune chez les éleveurs de chevaux".

On connaît une situation tout à fait comparable dans les Asturies, autour de Somiedo. Les chevaux sont laissés en liberté sur l'alpage, et ne sont pas gardés par des chiens, contrairement aux bovins : "Sur la commune voisine de Belmonte, le cheptel est constitué à 80 % de chevaux et 20 % de vaches (380 chevaux sur 20000 ha), explique le maire de Pula de Somiedo, Belarmino Fernandez. Or, pour les chevaux, le dégât est très bien remboursé, bien plus cher que le prix du marché. Je peux vous dire que les gens ne se plaignent pas des dégâts, et élèvent de plus en plus de chevaux".